Mardi 9 juillet a eu lieu un conseil d’administration extraordinaire. En effet, le 26 juin 2024, Alain Fuchs a annoncé aux administratrices et administrateurs de l’université sa démission pour « raisons personnelles ». Dans la foulée, une dépêche AEF nous apprend que l’IGESR (Inspection générale de l’Éducation, du Sport et de la Recherche) a été saisie par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche pour mener une enquête administrative à PSL à la suite de signalements qui lui sont remontés.
Suite à cette démission inattendue, un CA extraordinaire a donc été convoqué pour élire un ou une présidente par interim jusqu’aux prochaines élections et la prise de fonction du et de la prochaine présidente en début d’année 2025.
Dans la convocation, nous avons ainsi appris que le directoire proposait, comme il a déjà été fait par le passé (Marc. Mezzard lors du départ de Thierry Coulhon), un membre du directoire comme président par interim. Cette fois ci, c’est E. M. Mouhoud, président de l’université Paris-Dauphine, qui a accepté d’assurer la transition.
L’ordre du jour était simple : point d’information sur la démission d’Alain Fuchs, vote pour l’élection d’E. M. Mouhoud, et délégation des pouvoirs du conseil d’administration au président de l’université PSL par intérim.
Démission du président de l’université
En réalité, le point d’information a été très vite expédié, et n’a consisté qu’en la simple constatation collective de la démission d’A. Fuchs… Aucune discussion n’a eu lieu à ce sujet comme au sujet de l’enquête en cours… Nous avons tout de même pris la parole pour demander si on pouvait avoir quelques informations sur l’enquête. Évidemment, on nous a répondu que personne ne pouvait rien dire avant les conclusions de l’enquête. Nous sommes intervenu·e·s aussi pour dire que s’il s’avérait qu’il y ait eu des fautes graves, il était très important d’en comprendre les causes et les manquements de l’institution avant les prochaines élections pour éviter que cela se reproduise.
Proposition de candidature de la part du Directoire à la présidence par intérim
de l’université PSL
E. M. Mouhoud a ensuite été présenté par Dominique Deville de Périère, doyène du directoire assurant la présidence de la réunion, puis E. M. Mouhoud lui-même a présenté sa profession de foi envoyée en amont.
Là encore, tout cela était prévu pour être expéditif, et là encore, nous avons été les seul·e·s à intervenir dans un CA réduit toujours et encore à une simple chambre d’enregistrement. Nous avons posé quelques questions :
Question : Au sujet de la candidature du président de Dauphine, nous avons demandé ce qui allait se passer au niveau de son université d’origine, et comment allait-il pouvoir assurer de front les charges de direction des deux établissements en même temps. Nous nous sommes aussi étonné·e·s du fait que la communauté dauphinoise n’ait pas été mise au courant de la démission de Fuchs ainsi que de la volonté d’E. M. Mouhoud de faire la transition.
Réponse : E. M. Mouhoud a répondu qu’il avait communiqué auprès du Comex de l’université, et des conseils centraux élargis (mais n’a pas répondu sur l’annonce de la démission d’A. Fuchs). Il a assuré que dans les deux universités, il était entouré d’équipe de direction très forte, d’un Comex et d’un directoire très efficaces. Il a annoncé aussi que la direction de PSL serait très collégiale (enfin, avec le directoire…), et qu’il réunirait très régulièrement le bureau du directoire « ce qui a pu manquer par le passé » (peut-on y voir une attaque de la gestion d’A. Fuchs ?). Il a répondu qu’il n’avait pas beaucoup d’inquiétude quand à la gestion des deux directions d’établissement.
PS : pour rappel, le bureau du directoire comprend 6 membres : le président de l’Université PSL, qui le préside ; un membre du comité exécutif désigné par le président de l’Université ; le directeur de l’École normale supérieure ; le président de l’Université Paris Dauphine ; un membre, désigné pour six mois par les écoles d’ingénieurs ; un membre, désigné pour six mois par les autres établissements-composantes. « Les débats du Bureau du Directoire ne sont pas publics et sont couverts par une obligation stricte de confidentialité à l’extérieur du Directoire. » (Règlement intérieur de PSL)
Question : Nous avons demandé si cette candidature laissait présager une volonté de se présenter aussi pour les prochaines « vraies » élections.
Réponse : E. M. Mouhoud a répondu qu’il était candidat à l’intérim et pas à autre chose et que c’était au research comitee de trouver un nouveau président et de demander aux personnes pressenties s’ils et elles accepteraient cette tâche.
Question : Enfin, nous avons demandé quelles représentations de l’ESR et de notre établissement comptait-t-il porter auprès du prochain gouvernement dans ce contexte politique complexe révélateur de la montée profonde des idées d’extrême droite. Il y aura certainement des choses qui vont se jouer à cette échelle avant même les prochaines élection à PSL.
Réponse : E. M. Mouhoud a répondu qu’il était extrêmement inquiet avant le résultat du second tour des législatives, et qu’il continuerait ce qu’il faisait déjà en tant que président de Paris-Dauphine, « avec force et conviction ». Qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire en terme de moyens à mettre en œuvre ? Tout cela est bien flou.
Le vote a eu ensuite lieu, en mode hybride, et E. M. Mouhoud a été élu avec 27 voix « pour » et quatre « contre » (il lui fallait 19 voix pour être élu).
Suite au vote, nous avons fait une explication de vote que nous retranscrivons ici.
Même si cette élection est avant tout un moment de transition « technique » imposé, et parce que le poste de président est tout de même symbolique, nous souhaitons profiter de cette occasion pour rappeler quelques-unes de nos positions vis-à-vis de notre institution.
L’histoire de PSL incarne à merveille les réformes de l’ESR de ses, au moins, 20 dernières années. Nous sommes opposé·e·s à ce que ces réformes produisent, et je vais lister maintenant quelques points problématiques :
Comme l’illustre la composition de ce CA, la structure même des instances empêche la démocratie universitaire, réduisant les CA et ce CA en particulier en chambre d’enregistrement où le débat et l’élaboration collective n’existent pas.
Les dirigeants des universités ne sont plus des collègues qui assurent temporairement la direction des établissements pour revenir à l’enseignement et la recherche ensuite, mais deviennent des professionnels de la gouvernance.
PSL s’inscrit dans la recherche permanente de la soi-disant « excellence », notion très floue, et fondée sur des classements et des métriques très peu interrogées, dont la pertinence pour l’enseignement, la recherche et les conditions de travail est plus que discutable. Il faut avoir conscience que nous sommes parmi les « premiers de cordée » de l’ESR et il nous semble très problématique de chercher à se distinguer ainsi des institutions sœurs. Nous participons à produire un ESR à deux vitesses, ce qui est délétère pour l’ensemble de la communauté en France. De ce point de vue, il serait audacieux, pour nos établissements, de cultiver un autre paradigme pour un ESR émancipateur pour l’ensemble de la jeunesse. Cela pourrait commencer tout simplement par une sortie immédiate de l’UDICE.
Enfin, PSL participe à la normalisation et à l’accentuation du financement de la recherche sur projet et à la destruction du statut de fonctionnaire. Les financements sur projet et La mise en place de la LPR sont un fléau pour nos conditions de travail, d’enseignement et de recherche, et aussi pour la qualité de la recherche en général.
Pour toutes ces raisons, mais pour bien d’autres aussi, nous avons voté contre la proposition d’un nouveau président à cette institution quel qu’il soit, tout du moins tant qu’il incarnera cet esprit, sans avoir spécialement quelque chose contre M. Mouhoud.
Prochain CA
Ce CA va donner un nouveau CA extraordinaire le 16 juillet 2024. Il sera proposé de changer les statuts pour pallier un dysfonctionnement entre la fondation et l’université, puisque pour la fondation, la durée de l’intérim est d’un an contre 6 mois pour l’université. Il sera donc proposer un alignement sur la durée d’un an présente dans les statuts de la fondation.
Ce second CA sera aussi l’occasion de valider les vice-président·e·s de l’université.
Enfin, il sera proposé de modifier le fonctionnement du research comitee qui, à l’heure actuel, doit remettre ses propositions 14 jours après la date butoir d’envoi de candidature. Ce délais étant bien trop court pour un travail sérieux, il sera proposé d’enlever cette mention.