CA du 28/05: rémunération du président, orientation budgétaire et licence BNP

Le conseil d’administration de PSL s’est réuni le 28 mai en séance plénière. L’ordre du jour comportait notamment l’examen de la lettre d’orientation budgétaire, le vote de la rémunération du président et des vice-président·e·s et un point d’information sur le diplôme d’établissement intitulé « Sciences pour un monde durable ». Les autres points seront plus rapidement évoqués en fin d’article.

Discussion générale sur la crise sanitaire

Le CA s’est ouvert sur une discussion générale à propos de la gestion de la crise sanitaire par les établissements-composantes de l’université PSL, notamment l’ENS, de Paris-Dauphine, de l’institut Curie, etc.

Ces informations, bien que faites par les décideurs et décideuses de ces établissements, et donc très peu critiques de leur choix et politiques, ont été instructives.

Nous sommes principalement intervenu·e·s pour discuter de la place dévolue aux « premier·e·s de corvée » des établissements, à savoir, principalement les collègues du ménage et de la sécurité. Nous avons insisté sur le fait que cette crise a visibilisé ces emplois fondamentaux, que malheureusement ces salarié·e·s sont souvent mal payé·e·s, en première ligne, moins protégé·e·s par leurs statuts, parfois maltraité·e·s par les employeurs (comme à Dauphine), habitent souvent loin de leur lieux de travail, et doivent faire de longs trajets en transport en commun. Ce point a lancé une discussion intéressante et nous avons eu un appui partiel d’autres élu·e·s.

Notre principale demande a été de proposer que l’établissement PSL engage un processus de réinternalisation de ses services essentiels (notamment ménage et sécurité) et lance une vaste campagne pour qu’il en soit fait de même dans dans les établissements-composantes de PSL. Dossier à suivre.

Lettre d’orientation budgétaire

À quoi sert-elle ?

Le vote de la lettre d’orientation budgétaire (LOB) et le débat associé étaient au cœur du second conseil de la mandature. Ce texte fixe en effet l’orientation budgétaire non seulement de l’université PSL mais aussi des établissements qui la composent. En effet, les budgets qui seront votés par les conseils de ces institutions devront être en adéquation avec la lettre d’orientation budgétaire de PSL. Si ce n’est pas le cas, le président de PSL peut utiliser un droit de veto, obligeant les conseils concernés à revoir leur copie.

Qu’en penser ?

Cédric Prunier, directeur général des services, fait une présentation succincte de la lettre dans une version déjà approuvée par le directoire (sic).

Malgré un texte difficile à lire, qui traite aussi bien de points très locaux que de grands principes, celui-ci présente une orientation pour PSL qui nous semble, à nous élu·e·s des listes « démocratie au cœur de PSL », aller dans la mauvaise direction, et ce pour plusieurs raisons.

D’abord elle acte le droit de veto du président de PSL sur le budget des établissements composantes, droit de veto qui, pour rappel, peut s’exercer dans trois cas : « si le budget de l’établissement-composante (a) contredit les orientations générales de la LOB ; (b) compromet la réalisation d’une opération commune ; (c) présente un défaut de soutenabilité susceptible de mettre l’Université PSL en danger. » (LOB 2021).

Elle affirme ensuite la volonté de développer des ressources propres issues du mécénat ou de la formation continue, ou de la multiplication de l’activité de Summer Schools dans une visée budgétaire affichée. L’objectif à trois ans est de parvenir à un « chiffre d’affaire d’un million d’euros sur ces nouveaux diplômes qui viendront alimenter le modèle économique de l’innovation » (LOB 2021). Les investissements immobiliers en cours laissent présager une montée en puissance des activités de PSL EP ce qui laisse également présager un rapport de force mouvant au désavantage des établissements comme le laisse craindre le développement des Programmes Gradués dont l’articulation avec les instances collégiales des établissements membres est loin d’être claire.

La LOB fait également largement mention de la pédagogie numérique comme d’une « innovation », l’objectif étant de développer des « modèles types d’enseignement à distance » grâce au « centre d’excellence pédagogique » porté par l’Université Paris-Dauphine pour le compte de PSL. Derrière des « modèles types », on peut ainsi craindre une forme de standardisation des pratiques pédagogiques et des modes de diffusion des savoirs ce qui ne sera pas sans conséquence sur le contenu du métier d’ enseignant·e·s-chercheur·se·s.

Pour ces différentes raisons, nous avons décidé de voter contre.

Le vote : 32 pour, 1 abstention, 5 contre

Rémunération du président et des vice-président·e·s

Ont également été votées au cours de ce conseil les rémunérations du président et des vice-président·e·s. L’enjeu est bien sûr financier, notamment pour celles et ceux qui occupent ces fonctions, mais aussi hautement symbolique. Il est notable que les critiques n’ont pas uniquement été portées par vos 5 élu·e·s syndicaux.

Comme nous le pensons aussi, plusieurs autres élu·e·s ont notamment trouvé que les sommes (161 000 euros bruts par an pour le président, et au maximum 126 000 euros pour les vice-président·e·s) des rémunérations étaient trop élevées. Avec d’autres élu·e·s et d’autres membres du CA, nous nous sommes étonné·e·s du fait que les rémunérations sont en dehors de toute grille de la fonction publique. Elles sont déconnectées de la vie quotidienne des membres de notre communauté.

Le seul argument que le directoire nous a opposé, c’est qu’Alain Fuchs a été reconduit à la suite d’un précédent mandat à la tête de PSL et qu’il ne serait pas correct de baisser son salaire.

Une discussion s’est aussi engagée sur le comité des rémunérations, instance qui a réfléchi à une évolution de ces rémunérations. Cette instance est composée de trois membres du CA, qui sont tous de rang A. Il a été proposé par un élu de modifier le règlement intérieur pour inclure un·e élu·e des listes BIATSS et assimilé·e·s. Nous ne pouvons qu’appuyer ce type de proposition.

Si les objections étaient justes, cela n’a malheureusement pas conduit les membres du CA réticent·e·s à voter contre.

Le vote : 25 pour, 8 abstentions, 5 contre

Pour ce vote, il a été demandé par les élu·e·s un vote à bulletin secret, via l’envoi d’un mail au représentant du rectorat.

Charte égalité et diversité

Une charte concernant l’égalité femmes/hommes, les diversités et l’« égalité des chances » a été soumise à l’approbation du conseil. Nous sommes intervenu·e·s pour signaler que même si cette charte allait dans le bon sens, elle ne proposait pas suffisamment de choses concrètes. Nous sommes vigilant·e·s sur ces thèmes afin que la direction ne se cache pas derrière de grands principes, mais aide à la mise en place effective d’outils pour lutter contre les inégalités sociales, le sexisme, le racisme et toute forme d’oppression en général.

Cette charte ne proposait que la mise en place d’un groupe de travail PSL, ce dernier devant ensuite proposer un plan d’action. Elle proposait aussi de s’appuyer sur ce qui est fait dans les établissements, mais sans faire état d’aucune mesure concrète.

Nous avons proposé de reporter le vote au jour où nous aurons une proposition de plan d’action. Nous avons aussi proposé la mise en place de choses pratiques comme :

  • l’écriture inclusive dans les documents issus de PSL ;
  • le recensement écrit des mesures déjà mises en œuvre comme les campagnes d’affichage de l’université Paris-Dauphine, ou les comités parité dans les laboratoires sous l’impulsion du CNRS.

Enfin, nous nous sommes opposé·e·s à l’utilisation de l’expression « égalité des chances » dont nous avons demandé le retrait du texte de la charte. Cette expression fallacieuse gomme la réalité des inégalités sociales qu’il s’agit de combattre et tend à faire passer les quelques aides que peuvent recevoir les étudiant·e·s issus de milieux défavorisés comme suffisantes pour assurer une égalité entre les étudiant·e·s, ce qui est très loin d’être le cas malgré les efforts faits en ce sens. L’introduction de la notion de « chance » rend finalement chacun·e responsable individuellement de son succès ou de son échec, à la manière d’un·e auto-entrepreneur·se : celles et ceux qui ne réussissent pas n’ont tout simplement pas su profiter de leur chance, cela n’a rien à voir avec la nécessité de mener de front études et « petits boulots » par exemple.

Finalement, Alain Fuchs a proposé de repousser à un CA ultérieur l’examen de la charte qui devra comporter le plan d’action sus-cité.

« Licence » Sciences pour un monde durable

L’enjeu

La direction de PSL a porté l’an dernier le projet de création d’un diplôme d’établissement intitulé Impact positif et intégralement financé par la banque BNP Paribas (voir cette page). Ce projet avait été très critiqué en raison notamment de la participation de cette banque au financement d’ énergie d’origine fossile, principale cause du réchauffement climatique. Le mécénat a été considéré comme une opération de green-washing de la part de la BNP, d’autant plus qu’il était assorti d’une clause de non-dénigrement protégeant l’image du mécène.

Le nouveau projet porté par la présidence s’intitule désormais Sciences pour un monde durable et nous avions demandé à ce qu’un point d’information à ce sujet soit ajouté à l’ordre du jour. Nous avions également demandé à avoir accès à la convention signée entre BNP Paribas et la Fondation de coopération scientifique (FCS), ce qui nous a été refusé au motif que nous ne sommes pas administrateur·rice·s de cette dernière instance.

Comme le montre la LOB discutée plus haut, ce diplôme est pourtant au cœur de la construction de l’université PSL, qu’il s’agisse de son offre de formation, du développement de ses ressources propres ou de ses projets immobiliers. Nous avons donc fait remarquer qu’il était particulièrement regrettable que le CA n’ait pas un contrôle plus important sur les activités de la Fondation.

La présentation

Isabelle Catto, vice-présidente licence et affaires académiques, présente le diplôme. La formation est « centrée sur le développement durable au sens large (sciences de la nature mais aussi sciences humaines et sociales) et une part importante est consacrée à des projets interdisciplinaires. Cette formation se veut résolument internationale (enseignement en anglais, summer schools, universités partenaires etc.). Le volume horaire de la formation est conséquent et calqué sur celui du CPES. La sélection des 30 étudiants doit permettre d’atteindre au moins 50% de femmes et 25% de boursiers et assurer une diversité d’origine géographique. Le comité de sélection a reçu 450 dossiers complets. »

Les questions que nous avons posées

La première question que nous avons posée est la suivante : Y a-t-il d’autres mécènes aujourd’hui et si oui, à hauteur de quels montants ? Isabelle Catto indique qu’Engie et Foncia se sont aussi engagés, ainsi que l’Ademe en tant que mécène de compétences. Alain Fuchs indique qu’il refuse de communiquer les montants, respectant ainsi le souhait des mécènes. Il affirme aussi que le retrait de l’un des mécènes ne mettrait pas en danger le projet. Quand nous demandons ensuite des précisions sur l’ancienne clause de non-dénigrement rebaptisée depuis clause de respect de l’image, Alain Fuchs perd son calme et nous accuse de ne pas nous intéresser au projet pédagogique, de nous focaliser sur la question des mécènes. Nous poursuivons en demandant des précisions sur les enseignant·e·s éventuellement déjà impliqué·e·s dans la formation et leur rémunération. Cela devrait rentrer dans le cadre de leurs services statutaires mais un recours à des vacations sera nécessaire. Enfin nous demandons des précisions sur la manière dont seront attribuées les bourses et quel sera leur montant. L’objectif est de doubler la bourse du CROUS et on nous a promis plus d’informations sur le comité qui les attribuera quand celui-ci sera constitué.

La réaction des autres élu·e·s

Philippe Mayol, personnalité qualifiée et directeur général de la fondation Terre solidaire, s’étonne du choix de la banque qui figure au huitième rang des banques mauvaises élèves en termes de financement des industries polluantes. Il souligne que l’implication de la BNP dans une formation de développement durable pourrait à terme gravement nuire à l’image de l’Université PSL. Il ne faut pas oublier, ajoute-il, le souci de cohérence des jeunes générations qui nous oblige à être particulièrement irréprochable. La réaction de la présidence de PSL à cette intervention fut particulièrement virulente. Le travail de veille de la société civile sur l’agissement des grandes multinationales, notamment financières, a été disqualifié d’un revers de main. Les ONG n’auraient rien compris nous a-t-il été souligné. Si la BNP investit encore dans l’industrie polluante, c’est qu’elle s’est engagée sur des investissements pluri-annuels. Cette défense sans concession de la BNP est une illustration claire de la manière dont les responsables de nos établissements pensent la résolution des problèmes environnementaux. Il ne faut toutefois pas oublier que nous savons depuis longtemps que « la maison brûle ». Cela ne fait pas 10 ni même 20 ans, mais a minima depuis les années 1970 que les alertes écologiques sont systématiquement mises sous le tapis par les gouvernements et les pouvoirs économiques (voir à ce propos l’apport de nos collègues historien.ne.s). Et pourtant la BNP-Parisbas était la première banque française (la huitième à l’échelle internationale) en termes de financement des industries participant fortement au changement climatique dans les années 2000. Et elle confirme depuis ce positionnement stratégique en finançant la construction de méga-projets de centrales au charbon au Chili et en Inde, sans parler du fameux projet Datteln 4 en Allemagne qui devrait être mis en service prochainement. Volker Quaschning, professeur de systèmes d’énergies renouvelables à l’école supérieure HTW de Berlin le rappelle dans un article du Monde : « Une centrale électrique doit fonctionner pendant au moins trente ans pour être économiquement rentable ».

Bref, la Fondation PSL pouvait difficilement trouver pire soutien pour un diplôme mettant au cœur de ses ambitions une volonté louable de proposer une réponse, par la formation, aux enjeux climatiques de notre temps.

Les autres points à l’ordre du jour

Outre l’approbation du compte rendu officiel de la séance précédente et un point sur la mobilisation des établissements face au COVID, l’ordre du jour comportait également les points suivants :

  • Désignation des personnalités du Conseil d’Orientation Stratégique. Ce conseil a vocation à évaluer le travail accompli par PSL. Est ici recherché l’avis de chercheur·se·s avec un « rayonnement international » et ayant eu des responsabilités à la tête d’établissements de recherche. L’idée est de fournir à PSL une évaluation du travail institutionnel accompli en amont du jugement du jury de l’IDEX.
  • Désignation des membres de la Commission de déontologie. Cette commission doit veiller à la déontologie dans PSL, notamment aux cas de conflits d’intérêt, en particulier pour ce qui est des interactions avec le privé. Le collège 2, celui des élu·e·s, doit proposer une personne. Nous, élu·e·s des différentes listes, n’avons pas pu préparer assez en amont ce choix, et nous avons donc indiqué que nous proposerons quelqu’un·e au prochain CA.
  • Communication syndicale. Une charte d’utilisation pour la communication syndicale à l’ensemble des personnels relevant de PSL a été votée, ce qui devrait nous permettre de communiquer sous peu avec l’ensemble de la communauté PSL.
  • Conventions régissant certains diplômes nationaux.
  • Convention de versement des crédits attribués au BDE CPES.

Enfin, quelques points d’information ont complété cet ordre du jour chargé, notamment un point concernant le report des élections au sénat académique, l’adoption de la charte Science ouverte, la mise en place d’un portail HAL pour PSL et la candidature à l’appel à projets SFRI.

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