PSL n’est ni un bon outil, ni un modèle pour l’ESR !

Le modèle de l’université PSL, établissement expérimental dérogeant au code de l’Éducation ainsi qu’à de nombreuses règles nationales régissant les universités, est vanté dans tous nos établissements, avec comme argument « massue » le fait que cette « université » est désormais en bonne place dans les classements internationaux. Ces classements reposent souvent sur des critères non-pertinents et mettent en compétition les établissements. ils sont de ce fait particulièrement délétères pour l’Enseignement Supérieur et la Recherche (ESR). De plus, ils transforment, un peu comme l’ensemble des services publics, les usager·es (étudiant·es) en clientèle ce qui trahit l’esprit de la fonction publique. PSL est un accélérateur de ces transformations et des orientations de la loi de programmation de la recherche (LPR), orientations que l’on combat frontalement. 

Faire le terrain d’une possible fusion

La mode des manageurs de l’ESR est donc, pour être «compétitif», d’avoir de gros établissements pour mécaniquement monter dans les classements. Cela permet au passage de faire des « économies d’échelle » en factorisant des « dépenses » — notamment pour les services informatiques, administratifs, sociaux, médicaux, sportifs, etc. —  au sein de services qui sont souvent déjà dans des situations critiques. Le jury de l’IDEX de PSL a encore montré cette volonté, en émettant des « recommandations » (tardivement rendues publiques via des canaux extérieurs à PSL) notamment en matière de renforcement des pouvoirs des présidences, ou encore d’abandon « dès que possible » de « tout ce qui permet le déploiement de stratégies autonomes de la part de composantes », en particulier « le maintien de la personnalité morale ». Ceci montre que, pour le jury de l’IDEX, il faut ouvrir la voie à la transformation des établissements membres en départements de PSL, à leur fusion, à la remise en cause des statuts particuliers des personnels, aux mutualisations dictées par le manque de postes, à la privatisation… Même si à l’heure actuelle, le président de PSL, comme ceux et celles de la plupart des établissements composantes, clament que « le principe de préservation de la personnalité morale et juridique des établissements composants de PSL est au cœur de ce modèle », et que ces recommandations n’ont pas vocation à être suivies, nous restons tout particulièrement attentifs et attentives à cette éventualité contre laquelle, le cas échéant, il faudra se mobiliser pour la contrecarrer. 

Les mutualisations sont déjà là 

Mais attention, le « modèle » de PSL n’a pas besoin de la fusion en bonne et due forme pour transformer nos cadres et conditions de travail. Des mutualisations de services sont déjà  en place, et même si, pour l’instant, ceci se produit sur la base du « volontariat », le rouleau compresseur de ce modèle néo-libéral de l’ESR est en marche ! Les services dans nos établissements sont très souvent en surcharge de travail, les enseignant·e·s/chercheurs·ses, BIATSS et ITA sont pour beaucoup largement débordé·e·s, et plutôt que des mutualisations au détriment de la qualité de service, nous avons un besoin urgent de plus de moyens et de plus de postes ! Les mutualisations et autres convergences (système d’information, etc.) en cours créent les conditions et pourront être exploités comme arguments pour justifier une future fusion.  Par exemple, le directeur des systèmes d’informations (DSI) de Chimie ParisTech n’a pas été renouvelé suite son départ à la retraite. Le DSI de PSL est alors devenu DSI de Chimie ParisTech également, le poste étant ainsi mutualisé au détriment de Chimie ParisTech qui a donc perdu un poste. 

Le détournement des énergies aux dépens de la recherche

La course permanente pour obtenir des financements suffisants pour la recherche, répondre à des appels à projet en particulier au sein de PSL, et, une fois obtenus, l’obligation incessante de rendre des comptes via des indicateurs dont on peine à comprendre la pertinence, nous détournent, personnels administratifs, techniques et  chercheur·es, de nos missions premières : produire et transmettre collectivement des connaissances. Il faut remettre les activités de recherche au centre des politiques de recherche. Cela s’accompagne de la dérive mortifère des financements sur projets de la recherche, qu’accentue encore la LPR, et dont PSL se veut la meilleure élève.

PSL et les graves problèmes démocratiques

Lors de la création des « nouveaux statuts » de PSL, nous nous sommes battu·e·s contre. L’établissement PSL est aujourd’hui conduit par le président et le directoire du conseil d’administration (CA) de PSL, qui imposent seuls leurs décisions au mépris de la démocratie universitaire. La structure même du CA fait que les élu·e·s y sont minoritaires. Ainsi ce CA n’est qu’une simple chambre d’enregistrement des décisions du directoire aucun débat n’y ayant véritablement lieu. Concernant le sénat académique, le conseil d’administration de PSL a adopté, de janvier à novembre 2020, toute une série de décisions en matière d’enseignement et de recherche sans avoir recueilli l’avis préalable, et obligatoire de celui-ci, compétent en ces domaines. Par ailleurs, le fonctionnement balbutiant du Sénat nouvellement élu ne permet pas de penser cette instance comme une forme de contre-pouvoir au directoire ou au CA, car le ou la présidente du Sénat est nommée par le président de PSL.

Toujours plus d’ouverture aux intérêts privés 

La gouvernance de PSL se montre particulièrement ouverte aux partenariats avec les entreprises privées qui se décident dans l’opacité que permet la Fondation PSL. Sans notre vigilance et notre mobilisation, la gouvernance de PSL aurait bradé le travail de nos collègues pour obtenir des financements privés, à l’instar de la licence dite « BNP ». Ce projet de mécénat d’entreprise privée reste géré dans l’ombre par la Fondation PSL qui devient progressivement l’espace d’élaboration des projets les plus sensibles. Nous ne pouvons accepter ces politiques de soumission à des intérêts privés, et qui vont à l’encontre de l’intérêt général, en accordant le crédit symbolique de nos diplômes et de nos institutions publiques à des formations d’intérêt privé, guidées par une logique instrumentale du profit et dans ce cas précis, par une démarche de « green washing » à peu de frais.

Quelques propositions 

— Nous défendons l’emploi des agents des établissements composantes contre tout déploiement des services de PSL qui, au nom des économies d’échelle, se traduirait par des destructions de postes.

— Nous défendons le principe de subsidiarité que nous avons réussi à faire inscrire dans les statuts de PSL et lutterons contre la centralisation et la bureaucratisation rampantes. L’autonomie de notre établissement doit être constamment défendue dans chacun des conseils, car chacun, dans leurs domaines respectifs, peut voir ses prérogatives préemptées par la gouvernance de PSL : les décisions de PSL touchent aussi bien à la détermination de la politique budgétaire qu’à la délivrance des diplômes, au financement de la recherche, etc.

— Nous défendons la démocratie universitaire. Les décisions prises par PSL doivent respecter les principes démocratiques internes des établissements composantes ; les procédures de PSL ne doivent en aucun cas servir de voie de contournement.  Nous nous battons pour la revalorisation du débat démocratique au sein de PSL.

— Nous défendons une autre vision de l’évaluation de nos formations et de la recherche, fondée sur les véritables besoins des étudiant·e·s et sur l’évaluation par les pair·e·s.

— Nous défendons une représentation réelle et authentique du personnel des établissements composantes, au niveau de PSL pour que les enjeux sociaux des décisions prises par PSL soient discutés à ce niveau. Nombre de décisions de PSL modifient l’organisation du travail de chacun·e, comme la mise en place de service mutualisé, et ne font pas l’objet d’un réel dialogue social.

— Nous défendons une politique de revalorisation de nos salaires (et du point d’indice), et une dynamique collective de nos métiers soutenue et non entravée, à rebours des pratiques actuelles de PSL.

Signatures

SNTRS-CGT Campus Curie-DR2 (Chimie ParisTech, Mines ParisTech, Institut Curie, CNRS) —  CGT Mines ParisTech — SNTRS-CGT ESPCI — CGT Paris Dauphine — SNTRS-CGT et CGT Ferc-Sup ENS — Les élu·e·s des listes « Démocratie et intérêt général au cœur de PSL » au CA de PSL